La chaleur ambiante était étouffante. Il pouvait sentir des gouttes de sueurs couler lentement sur ses tempes, certaines tombaient même dans ses yeux, lui brouillant la vue. Son uniforme lui collait à la peau. La sangle de son arme lui sciait l’épaule. Pourtant, Caleb ne s’en plaignait pas pour autant. Il avait choisi d’être ici. Dévoué, il effectuait la moindre des missions qu’il lui était demandé. Brillant, il avait même récemment atteint le grade de Lieutenant-Colonel au sein de l’armée. Fier, le pouvoir ne lui était pourtant jamais monté à la tête, ayant toujours considéré ses hommes sous son commandement comme ses égaux. A la tête d’une petite troupe, Caleb était chargé d’une mission de reconnaissance dans un petit village au sud, dans la province du Helmand. L’endroit était reconnu pour être instable, mais cela faisait plusieurs semaines qu’aucunes attaques n’avaient eues lieu dans la région. De plus, le village avait déjà été l’objet de visite par l’armée et avait été considéré sans danger et un campement se trouvait à une vingtaine de kilomètres, ce qui expliquait le petit effectif. En soi, Caleb résumait cela comme une journée des plus banales qui soient. Après une ronde dans le village de quelques heures, Caleb et ses hommes s’étaient aventurer dans une zone environnante du village. Ses bottes crissaient sur le sol rocailleux et des montagnes s’étendaient à perte de vue. Il avançait lentement, tenant lâchement son arme, discutant tranquillement avec ses hommes. Sans les armes et les uniformes, ils ressemblaient presque à une troupe de touristes. C’est à ce moment-là que le premier coup de feu retentit. Toujours lorsqu’on s’y attend le moins. Tout se déroula très vite, en l’espace d’une seconde, il vit un de ses hommes s’écrouler dans un hurlement rauque, tenant son bras, le sang se répandant rapidement sur sa main. Poussé par le rush d’adrénaline, Caleb accourra jusqu’au soldat, tout en attrapant le talkie accroché à sa veste pour appeler du renfort. Un nouveau coup de feu retentit et c’est à ce moment-là qu’il comprit dans quoi ils s’étaient fourrés. En l’espace de quelques secondes, tout s’était transformé dans un chaos total. Les coups de feu se répétaient sans cesse, tout le monde courraient dans tous les sens espérant trouver une cachette pour recharger leur munitions. Caleb criait ses ordres à plein poumons, enchainant les coups de feu et les appels. Son cœur battait à tout rompre, il sentait tout son corps trembler. Il voyait certains de ses hommes, ses amis, écroulés au sol d’un air cadavérique. Il était incapable de voir s’ils respiraient encore. Tentant de se rapprocher de l’un d’eux, Caleb sentit soudainement une douleur fulgurante traverser tout son corps et s’écroula au sol. Impuissant, il perdait tous ses moyens. Il constata rapidement que sa jambe était touchée. Rassemblant ses forces, il plaqua son arme contre lui et tenta de ramper jusqu’à un rocher contre lequel il s’écroula. Ses oreilles bourdonnaient. Il avait envie de vomir. Il essaya de se relever mais n’arrivait plus à tenir debout. Il entendait des cris, voyait de plus en plus de sang couler au niveau de sa jambe. Il était au premier rang de cette catastrophe, incapable de faire quoi que ce soit. Soudain, il sentit un métal froid se poser sur sa nuque, et la dernière chose qu’il entendit fut une détonation. Caleb se réveilla d’un sursaut, tremblant, en sueur. Il mit du temps à reconnaître l’endroit où il se trouvait, son cœur battant à tout rompre. Il mit quelques secondes à retrouver un semblant de calme. Il se répéta machinalement que non, il n’était plus là-bas, qu’il était rentré à la maison, que tout était fini. Il jeta rapidement un coup d’œil à l’heure, 4h52, il avait réussi trouvé quelques 3h de sommeil cette nuit, ce qui n’était pas trop mal. Il se leva péniblement. Tout lui avait semblé tellement réel qu’il se demandait si il n’était pas encore dans un autre rêve. Il se traîna jusqu’à la salle de bain et s’aspergea le visage d’eau fraîche. Il faillit ne pas se reconnaître lorsqu’il croisa son reflet dans le miroir. Puis soudainement, il se tint droit, les bras le long du corps, avant d’amener sa main droite à son front et d’effectuer le salut militaire. Il répéta le geste plusieurs fois, frénétiquement. Si quelqu’un voyait la scène, il le prendrait surement pour un fou. Il ne savait même pas pourquoi il le faisait, il n’avait aucune raison, pourtant, il gardait ses yeux river sur son reflet, répétant encore et encore le fameux salut. Il s’arrêta tout aussi soudainement et retourna lentement à sa chambre. Il se glissa sous les draps et ferma les yeux espérant ne pas croiser une nouvelle fois ses démons.